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21 octobre 2012

L'hiver finira un jour, chapitre 4

Le seigneur avait parlé longtemps, assez longtemps pour que Gabrielle s'évade de son discours si grandiloquent et gagne le territoire des rêves. Elle avait pourtant entendu chaque mot, comme toujours ; elle savait écouter même lorsque son esprit voyageait à des lieux de son quotidien.

« J'espère que votre route sera douce. » dit-elle lorsque le seigneur se tut enfin.

Du coin de l'œil, elle remarqua qu'il la dévisageait. Elle se sentit vaguement agacée de cette marque d'attention, et s'en voulut.

« N'êtes-vous pas un peu triste de me voir partir, Madame ? » demanda le seigneur.

Gabrielle lui fit la grâce d'un sourire.

« Votre absence nous affligera tous. » dit-elle avec sincérité. « Mais mon cœur trouvera consolation de vous savoir auprès de mon père, seigneur Caron. »

« Je saurai être pour lui ce que vous voudriez que je sois. » déclara l'homme en s'inclinant. « Je reviendrai avec votre père, ou je ne reviendrai pas. Cependant, vous laisser seule ici m'est une souffrance, Madame. J'apprécierai que vous acceptiez un gage de ma fidélité. »

Gabrielle sourit encore, sans aucune joie. Rien ne pourrait jamais adoucir la peine qui était la sienne. Elle n'avait qu'un seul échappatoire, ses rêves. Mais elle n'eut pas le cœur de refuser au plus fidèle serviteur de son père l'illusion qu'il réclamait. Il avait eu pour elle tous les égards, essayant d'imposer sa présence comme s'il avait eu les moyens d'effacer une solitude infinie. D'une certaine façon, elle lui en était redevable. Aussi accepta-t-elle son présent, sans même savoir de quoi il s'agissait, par simple sentiment de devoir. Et en le faisant, elle infléchit sa destinée. Le seigneur Caron lui offrit la seule chose qui pouvait encore l’arracher à son monde d'ombres et de silence. Par la grâce d'un dieu clément, lui qui n'avait jamais su toucher son cœur devint soudain le pourvoyeur de vie. Il n'en eut sans doute aucune conscience. Elle non plus, pas sur l'instant, pas avant une éternité. Portant, elle eut le mérite de ne pas tourner le dos au destin lorsqu'il se présenta à elle. Cela tenait à la fois du hasard et de sa personnalité. Elle était fille de roi, héritière de l'empire le plus vaste que l'histoire humaine ait connu, élevée au rang d'oracle par un peuple dont elle ne connaissait rien, elle était fille de roi et de sa vie entière, elle ne l'avait jamais su. Elle était Gabrielle. Une femme cloîtrée, brisée de solitude, une femme à la recherche de ses racines. Une femme qui vivait de songes. Le seigneur Caron lui donna la réalité en cadeau, et il la lui donna de la manière la plus triviale : il lui offrit un cheval.

C'était un présent de valeur dans ce monde où le cheval faisait et l'homme et les rois, c'était un présent de valeur et c'était la liberté. Gabrielle en fut éperdue de reconnaissance. Elle en accepta la signification, écouta les promesses fidèles du seigneur Caron, laissa monter de son âme la sincère gratitude qui est le premier lien entre les hommes. Le seigneur partit vers son père avec sa parole presque engagée dans la mémoire, parole dont il était sûr d'obtenir le don à son retour. Rien d'autre ne l'intéressait. Ainsi Gabrielle lui accorda-t-elle ce qu'il désirait simplement parce qu'au travers de son présent, elle avait cru qu'il comprenait la détresse qui était la sienne. Elle se trompait. Mais lui aussi commettait une erreur. Gabrielle allait bientôt découvrir que le cadeau du seigneur Caron était simplement un signe du destin. Le reste, elle dut l'apprendre seule. Sur le chemin qui s'ouvrait à elle, les songes bientôt n'auraient plus de valeur. La réalité envahissait sa vie.

 

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